Très handicapant, le headshaking ou encensement du cheval est une pathologie qui entrave grandement la monte et peut même altérer la relation cavalier/cheval. Difficile à diagnostiquer, ce trouble nécessite des investigations poussées et un accompagnement spécifique afin de permettre à l’animal de retrouver une bonne qualité de vie et une harmonie avec son cavalier.
Comment reconnaitre le headshaking ?
Description du headshaking
Le phénomène d’encensement chez le cheval doit son nom aux balancements de tête qui suggèrent le mouvement de l’encensoir. S’il peut ressembler aux stéréotypies fréquemment observées en box, le headshaking s’en distingue par l’intensité et la durée du phénomène qui ne cède pas en séances de travail. Il est, d’ailleurs, souvent, plus présent lorsque le cheval est en activité et s’accroit avec l’intensité des efforts fournis.
Ces mouvements violents, d’apparition soudaine ou progressive, sont réalisés sur un plan vertical, horizontal ou en rotation. Ils semblent déclenchés par des douleurs faciales (comparables à la névralgie faciale chez l’Homme) en cas d’exposition à une lumière vive ou à des stimuli tactiles tels que le passage de l’air au niveau des naseaux, la pluie ou le vent.
Constants ou ponctuels, ces mouvements répétitifs sont associés à des signes de gêne nasale tels que des éternuements, des renâclements, des ébrouements, des jetages nasaux et des frottements du chanfrein sur les supports de l’environnement et sur les pattes antérieures. Le cheval semble anxieux et certains équidés peuvent même aller jusqu’à s’automutiler ou cesser toute alimentation tant le trouble est envahissant. Dans ces situations, la monte devient impossible car le comportement du cheval peut s’avérer dangereux.
Les différents grades de l’encensement
Les premiers symptômes de l’headshaking apparaissent, généralement, chez des chevaux de 6 à 10 ans et plutôt au printemps ou en été.
Selon leur gravité, les symptômes sont classés en 5 grades :
- Grade 1 : les symptômes sont légers et intermittents. Le cheval peut être monté.
- Grade 2 : les symptômes sont modérés et identifiés dans des situations spécifiques. Le cheval peut être monté avec difficulté.
- Grade 3 : les symptômes sont plus importants et le cheval est difficile à contrôler à la monte.
- Grade 4 : les symptômes sont tels que le cheval ne peut plus être monté.
- Grade 5 : les symptômes sont majeurs et le comportement du cheval le rend dangereux.
Généralement, les signes cliniques s’aggravent avec le temps au détriment de la qualité de vie de l’animal. Chez 60 % des chevaux atteints, ces manifestations apparaissent au printemps et en été, les journées ensoleillées étant sources d’une augmentation des symptômes chez certains chevaux appelés encenseurs photosensibles.
Quelles sont les causes du headshaking ?
À l’heure actuelle, il n’existe pas de cause clairement identifiée du headshaking même si l’hypothèse d’une hypersensibilité du nerf trijumeau est la plus soutenue par les vétérinaires. Plus précisément, il existerait deux types d’encensement selon leur étiologie :
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L’encensement à médiation trigéminale, auparavant appelée encensement idiopathique : il s’agit de la forme d’encensement la plus répandue consécutive à une inflammation du nerf trijumeau provoquant des névralgies. L’encensement photosensible y est largement représenté. Le nerf trijumeau fait partie des 12 nerfs crâniens que compte le cheval. Il se divise en trois branches (mandibulaire, maxillaire, ophtalmique) et assure la sensibilité de la face mais aussi la fonction motrice des muscles masticateurs. Des facteurs hormonaux et alimentaires entreraient également en jeu dans l’encensement à médiation trigéminale.
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L’encensement structurel, secondaire à une affection identifiée, responsable de lésions visibles des tissus. Cette atteinte peut être, notamment, dentaire, oculaire, respiratoire ou toucher le système myo-arthro-squelettique.
Comment diagnostiquer l’encensement chez le cheval ?
Le diagnostic de l’encensement chez le cheval reste très complexe. Il repose plus sur des critères d’exclusion, c’est-à-dire sur l’élimination des différentes causes possibles avant de conclure à un véritable headshaking. Il peut donc être long à établir. Le vétérinaire cherchera, notamment, à dépister :
- Un trouble purement comportemental comme les stéréotypies, fréquentes chez le cheval. Il s’agit de mouvements répétitifs, réalisés sans raison apparente, qui ne présentent généralement pas de caractère de gravité compte tenu de leurs faibles durée et intensité. Ces stéréotypies apparaissent dans des contextes spécifiques (isolement social, ennui, stress, insuffisance de fourrage, etc.). Toutefois, contrairement au headshaking, le hochement de tête stéréotypé du cheval présente la particularité de répéter un seul et même mouvement.
- Une gêne ou des douleurs au niveau de la bouche : il peut s’agir de problèmes dentaires (présence d’une surdent, inflammation de la gencive, carie, etc.), d’une mauvaise conformation des mâchoires entrainant une malocclusion (cheval prognathe ou bégu), d’affections des muqueuses de la joue ou du palais, d’inflammations causées par le mors, etc.
- Une gêne ou des douleurs au niveau des sinus telles qu’une sinusite infectieuse d’origine bactérienne, fongique ou parasitaire, une rhinite équine (d’origine allergique ou non), etc.
- Une gêne ou des douleurs au niveau de la gorge comme dans le cas de la gourme, une angine d’origine bactérienne extrêmement contagieuse qui provoque des abcès au niveau des nœuds lymphatiques de la gorge.
- Une affection des poches gutturales (situées de chaque côté de la gorge) telle que la mycose, maladie très grave d’origine fongique qui entraine des difficultés de déglutition et un saignement de nez abondant pouvant s’avérer fatal.
- Une atteinte des oreilles comme l’otite qui peut être d’origine bactérienne ou fongique (otite mycosique).
- Une atteinte des yeux telle qu’une conjonctivite allergique (inflammation de la conjonctive) ou une uvéite (inflammation des structures internes de l’œil).
Toutes ces pistes diagnostiques sont investiguées avant d’évoquer un headshaking, comme nous l’explique en vidéo Ludovic Tanquerel, vétérinaire au sein de l’Hôpital des équidés de l’EnvA. De multiples examens peuvent être réalisés en complément du recueil de l’histoire des troubles et de l’examen clinique : scanner de la tête, radiographie, endoscopie, etc
Comment soigner le headshaking ?
Les traitements conservateurs
Comme le diagnostic, le traitement de l’encensement chez le cheval s’avère complexe, reposant sur l’association de différentes techniques et molécules combinées selon le profil de l’animal et la sévérité du trouble. Le vétérinaire peut recourir à l’administration de médicaments spécifiques à base de chromoglycate sodique, de carbamazépine, de gonadotrophine ou de cyproheptadine afin de soulager le cheval.
Il existe également des mélanges de plantes sélectionnées pour leurs propriétés calmantes tel que Headshaking d'Arbalou Equiexpert.
Il peut aussi prescrire du sodium, du magnésium et des anti-inflammatoires. L’intervention chirurgicale sur le nerf trijumeau peut être envisagée : elle ne montre, cependant, que 49 % de réussite 18 mois après l’opération. L’utilisation de compléments alimentaires participe à la diminution des symptômes en réduisant l’anxiété de l’animal et en prévenant les affections sources d’encensement structurel secondaire. Ces compléments offrent aussi l’avantage d’apaiser les douleurs qui peuvent apparaitre à la suite des mouvements répétés par le cheval.
La neuromodulation
La neuromodulation est une technique d’électrostimulation nerveuse qui semble faire ses preuves dans le traitement des tremblements de tête consécutifs à un dysfonctionnement du nerf trijumeau. Véronica L.H. Roberts, chercheuse et maître de conférence à l’Université de Bristol (Royaume-Uni) montre, en effet, dans une étude publiée en 2019 réalisée sur 168 chevaux, que 53 % des équidés traités présentent une diminution des tremblements durant plus de 9 semaines. Le Dr Ludovic Tanquerel, précédemment cité, utilise, lui aussi l’électrostimulation au sein de l’Hôpital des équidés pour traiter les chevaux atteints de headshaking.
Réalisée sous sédation légère, cette technique permet de “fatiguer” le nerf trijumeau lors de séances d’une durée de plusieurs minutes à intensités électriques croissantes. Le cheval bénéficie alors d’une rémission pendant quelques jours. La répétition de ces séances offre à l’animal une rémission grandissante et jusqu’à 60 % de guérison au bout d’un an. Si certains chevaux sont définitivement guéris à la suite de ce protocole d’électrostimulation, la majorité des équidés nécessitent une nouvelle séance chaque année pour maintenir l’activité du nerf trijumeau.
L’utilisation d’un masque protecteur
Les stimuli extérieurs constituant fréquemment des facteurs déclenchants de l’encensement chez le cheval, l’utilisation d’un masque protecteur peut limiter l’occurrence du phénomène et contribuer à soulager l’animal de la gêne et des douleurs ressenties. Si un filet de nez réduit le passage d’air dans les naseaux et les stimulations tactiles, il ne permet pas de protéger les yeux de la lumière vive chez les encenseurs photosensibles. L’utilisation d’un masque anti-UV avec cache-oreilles et cache-nez répond alors aux besoins du cheval d’avoir la tête entièrement protégée.
Au pré, au box, en travail extérieur ou sur le plat, le masque equidival offre une protection à 90% face aux UV. Il protège, également, des poussières, des insectes et du vent. Les lunettes anti-UV sont, particulièrement recommandées pour les séances de travail, offrant une protection à 100%. Leur teinte varie selon le besoin du cheval et l’activité pratiquée. À noter qu’elles sont autorisées en compétition de dressage.
Si votre cheval est atteint d’headshaking, des solutions existent pour l’accompagner vers un mieux-être au quotidien. En parallèle de la mise en place d’un protocole vétérinaire spécifique, l’utilisation d’un masque facial haute protection et l’administration de compléments alimentaires permettent d’apaiser son stress et de limiter les sources d’inconfort. Ainsi soulagé, votre équidé retrouve le plaisir et la sérénité, ce qui favorise une nouvelle harmonie cheval/cavalier.
Sources :
L’encensement chez le cheval : signes cliniques, prévalence, physiopathologie
Pratique Vétérinaire Equine n° 219 du 01/10/2023
Le headshaking du cheval
La Semaine Vétérinaire n° 1743 du 07/12/2017